Cyril Douard et Laurent Mansuy sont de retour. Après leur prestation de la dernière édition dans le duo Alriyah, ils reviennent cette année avec un programme similaire, joué cette fois-ci en quartet. J’avais ressenti l’an dernier un décalage entre les deux membres qui créait un mélange surprenant et réussi.
Cette année, bien que les quatre instrumentistes se découvrent pour la première fois en live, je ressens une cohésion et une énergie différente. J’avais particulièrement apprécié le poème de Djalâl ad-Dîn Rûmî l’an dernier, et je l’ai trouvé cette année d’une encore meilleure facture. Gabriel Bonnin au violon et Matthias Labbe aux percussions apportent beaucoup de fraîcheur et d’homogénéité à la prestation. Je ne peux rester jusqu’au bout pour avoir une chance de m’installer confortablement à l’Opéra pour le concert suivant, mais
l’heure de concert que j’ai vue m’a séduit.
J’emporte avec moi le son indien des tablas de Matthias Labbe, qui m’aide probablement à deviner l’Asura qui se cache sur la scène de l’Opéra, Électro Deluxe. Tout au long de la soirée, le groupe se transforme et s’incarne sous différentes formes. Tantôt groupe qui flirte avec la pop, tantôt formation piano voix, tantôt ensemble instrumental de fusion, Electro Deluxe est une entité polymorphe, capable de se glisser dans n’importe quel genre musical avec une facilité déconcertante.
Ils s’explorent à travers la musique, utilisant chaque morceau comme une occasion pour découvrir une nouvelle forme de leur essence. Le groupe fait naître et détruit des univers musicaux tout au long du concert, sans jamais perdre son identité propre. Évidemment, pour réussir ce genre de prouesse, il faut une maîtrise totale de son instrument, et une connaissance parfaite des instrumentistes avec qui l’on joue. Ce n’est absolument pas un problème pour les membres d’Electro Deluxe. C’est le sentiment qui domine après ce concert. Je me dis que j’ai vu un spectacle précis, maîtrisé de bout en bout par des très grands professionnels. Tout est millimétré. La lumière, les interventions demandées au public, le rappel… Je vois bien toutes ces jolies ficelles, mais elles ne me gênent pas, pas quand c’est aussi précis et juste.
Inculte que je suis, j’écoute et découvre la musique de leurs débuts. Même si tout le monde change forcément en l’espace de 23 ans, la transformation est tout de même saisissante. C’est en cela qu’Electro Deluxe n’est pas simplement un groupe, mais une forme vivante qui transcende les genres. Une forme qui se déploie à chaque concert, grandissant, changeant, mais toujours reconnaissable par cette énergie, cette puissance, et surtout cette facilité déconcertante à faire remuer le popotin à tout un public, même lorsqu’il est confortablement installé dans un siège de l’Opera de Limoges.
Par Alexandre Fournet
Crédit photo : Didier Radiguet